Le Tarmac recevait le 18 septembre dernier le fonds Demeter, leader européen de l’investissement sur les secteurs du Développement Durable au sens large (smart cites, efficacité énergétique, économie circulaire, smart building, valorisation des déchets, éco-mobilité …).
L’occasion pour les entrepreneurs en préparation d’une levée de fonds de mieux connaître Demeter, et surtout, de mieux appréhender les bonnes pratiques pour approcher un fonds.
Mode de fonctionnement d’un fonds
Un fonds est une société de gestion qui a une durée de vie de 8 à 10 ans en moyenne, et dont le modèle de revenus repose sur les frais de gestion :
- Il se créée en allant lui-même chercher des investisseurs, généralement corporate et industriels, qui investissent dans le fonds en espérant une valorisation de leur mise de départ à la dissolution du fonds : ce sont le souscripteurs
- Il investit ensuite pendant la première moitié de sa durée de vie sur des projets en rapport avec sa stratégie d’investissement (amorçage, développement, thématique, etc) : pour cela, les fonds ont des partners qui gèrent les comités d’investissement et décident des investissements à réaliser, et des comités consultatifs avec les souscripteurs (qui n’ont pas de droit de vote sur les investissements réalisés mais apportent leur expertise sur l’analyse des dossiers)
- Puis il passe la seconde partie de sa durée de vie à préparer et finaliser ses sorties (rachat par un industriel, entrée en bourse, etc).
- En effet, tout fonds d’investissement doit être liquidé à échéance
Les fonds d’amorçage Demeter
Demeter regroupe pas moins de 80 investisseurs, aussi bien institutionnels (BPI, banques, family offices), que corporates avec de gros industriels (Forecia, Air Liquide, Suez, Nexity …). Plus de 160 investissements ont été réalisés depuis 2004, et Demeter gère actuellement 12 fonds dans 3 catégories différentes :
- L’amorçage pour les startups et scaleups (avec des investissements de 1 à 20 M€)
- La croissance pour les TPE / PME (avec des investissements de 5 à 15 M€)
- Et le financement de projets d’infrastructures (ex bornes de recharge électrique).
Actuellement, 5 de ces fonds sont phase de financement, dont 2 FNA (fonds nationaux d’amorçage) :
- Smart-up smart city : un fonds créé en 2017 doté de 46M€ pour financer en seed et série A des startups de la transition énergétique et environnementale – ce fonds de 4 ans a déjà financé 10 projets. Il lui reste 5 à 6 investissements à faire
- Agrinnovation : un fonds créé en 2018 pour financer des startups « de la fourche à la fourchette » (agritech, foodtech)
Les critères de ces FNA sont globalement les mêmes :
- Être dans la filière concernée
- Avoir une forte proposition de valeur, avec une différenciation significative (technologie de rupture, business model disruptif …)
- Un time to market compatible avec la durée de vie du fonds (10 ans depuis sa création)
- Un marché à dimension internationale en forte croissance
- Une équipe de management complémentaire et de qualité
- Avoir moins de 8 ans
- Être une entreprise indépendante
- Ne pas avoir d’investisseur institutionnel au capital
En amorçage, les tours de table sont en moyenne de 2-3 M€, en co-investissement. En série B, Demeter ne dépasse pas les 5-6 M€ dans une entreprise et reste toujours minoritaire.
Le niveau de maturité requis en amorçage :
- Un POC produit tangible et auditable
- Une proposition de valeur technico-économique validable avec des acteurs du marché
- 2-3 segments clairs et un segment de marché réellement validé
Le process :
- Un pitch rapide pour présenter l’horizon global, la cohérence avec le spectre de l’investisseur et les ambitions, en vue d’obtenir un RDV : attention, beaucoup de dossiers, donc il est important de donner envie et de montrer le potentiel.
- Un RDV de 1h où l’investisseur va valider que le projet coche toutes les cases et respecte les grands équilibres : potentiel / besoins, qualité du management et de l’équipe, POC, barrières d’entrées, différenciation de la proposition de valeur, stratégie d’accès marché. La différenciation dans le positionnement marché est primordiale …
- Investigation
Bonnes pratiques et conseils
- Bien choisir ses fonds en fonction : du niveau de maturité, du montant du ticket, du secteur d’activité, et de la phase de vie du fonds
- Recommandation & crédibilité: le mode de sourcing des dossiers est un indicateur de qualité. Entre un dossier envoyé via le site, et un dossier adressé par un BA ou un partenaire de confiance du fonds, le fonds regardera plus attentivement le dossier qui lui est transmis par un tiers de confiance.
- La force d’un projet réside dans la capacité de l’équipe dirigeante à générer de la confiance dans son réseau: un conseil stratégique avec des têtes de pont, des partenaires officiels prêts à s’engager dans l’aventure … sont autant de signaux positifs
- Montrer une roadmap des levées de fonds et des objectifs: ex tour 1 de x M€ pour industrialiser, tour 2 de xM€ pour scaler en Europe sur un nouveau segment, tour 3 pour le développement international …
- Attention à la cohérence : une levée de fonds de 10M€ pour un CA envisagé de 2,5M€ ne passera pas
- Ne pas trop ficeler son projet : l’investisseur aime bien apporter sa pierre à l’édifice
- Ne pas proposer, et encore moins imposer, la valo : la valo se co-construit avec le fonds
- Ne pas négliger le fit inter-personnel avec l’investisseur, qui va devenir une partie prenante importante de l’aventure pendant 7 à 8 ans. Il est primordial de créer du lien.
- Un binôme fondateur DG qui maîtrise les barrières d’entrée technologiques / un Président de Conseil stratégique qui porte la vision stratégique, les relations investisseurs et ouvre son carnet d’adresse est un tandem puissant, apprécié des fonds
- L’instruction d’un dossier prend au minimum 6 mois, et le fonds va regarder attentivement comment l’entreprise avance pendant ces 6 mois. La capacité à « dire ce qu’on fait, faire ce qu’on dit », et à tenir de manière opérationnelle ses milestones est un critère déterminant.