Semi-conducteur et souveraineté européenne : une carte à jouer pour l’écosystème Grenoble Alpes et inovallée dans cette course technologique ?

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Une forte dépendance matérielle de l’Europe, fruit d’une stratégie fabless qui montre aujourd’hui ses faiblesses

Le terme « fabless » a vu le jour en 2001, lorsque l’Europe et les Etats Unis ont commencé à décentraliser leurs centres de production en Asie pour se concentrer sur la R&D et la conception de produits. La Chine a été l’un des premiers pays asiatiques à profiter de ces délocalisations en masse des centres de production, de leur supply chain mais aussi de leurs principaux sous-traitants. D’autant pensaient qu’en gardant la propriété intellectuelle de conception, nous pourrions garder la maîtrise des produits. L’idée d’abandonner la production à faible marge pour concentrer nos efforts sur l’excellence scientifique pouvait sembler bonne, évidemment.

L’histoire a prouvé le contraire… La Chine, comme d’autres pays d’Asie (dont la Corée et Taïwan) ont su investir et développer la Recherche, s’inscrire à la pointe du progrès en musclant tous les maillons de chaîne jusqu’au produit final, là où nous sommes restés concentrés sur étapes de R&D, faisant de l’Europe en général et de la France en particulier une championne de l’innovation dans un pays sans usine (ou presque …).

En perdant la production, nous avons également perdu la maîtrise du produit, et nous sommes privés de la possibilité de l’améliorer en continu par la recherche appliquée. Certes nos champions internationaux continuent de se battre sur les marchés internationaux, mais le concept fabless a sans aucun doute dévalorisé la production en France, alors même qu’elle est essentielle dans toute industrie compétitive.

A l’heure où la Chine et les États-Unis vont redévelopper des capacités de fonderie, l’Europe pourrait-elle rester en dehors du jeu quand l’intelligence artificielle, le calcul haute performance, la 5G et les objets connectés vont faire exploser la demande de semi-conducteurs (le marché devrait progresser de 8,4% en 2021) ?

Constat de Thierry Breton : « dans l’industrie des semi-conducteurs, l’Europe s’est laissé distancer. Le manque d’investissements lui a fait prendre du retard ». Sa part dans la production mondiale est passée de 40% à 10% en 30 ans…

Quand la pénurie de composants, risque stratégique majeur pour les entreprises européennes, change la donne

La faiblesse de l’Europe réside dans sa dépendance vis-à-vis de l’Asie pour la fabrication des puces avancées. Il n’y a aujourd’hui que deux fondeurs de puces, sorte de sous-traitants, aux avant-postes de la course de la loi de Moore : le taïwanais TSMC et le coréen Samsung, seuls au monde à fabriquer des puces avec des gravures aussi fines que 7 nanomètres et 5 nanomètres.

Certes, l’Europe dispose d’entreprises à la pointe dans le domaine, comme le franco-italien STMicroelectronics, ou le hollandais ASML, spécialiste de la lithographie EUV (ultraviolet) permettant de fabriquer des composants de très petite taille. L’américain Globalfoundries dispose quant à lui d’une vaste usine dans la « silicon Saxony » allemande. Mais la filière reste largement dépendante de Taïwan et de Corée du Sud en termes d’approvisionnement.

Des approvisionnements que la guerre économique et technologique ouverte entre les USA et la Chine, puis la pandémie, ont rendu particulièrement difficiles. Et à en croire Intel, TSMC ou Nvidia, la pénurie sans précédent de composants qui sévit depuis plusieurs mois et impacte en profondeur l’industrie automobile comme les fabricants d’appareils électroniques n’est pas près de s’améliorer dans les mois qui viennent. Le retour à la normale pourrait ne pas avoir lieu avant … 2023, tant la demande dépasse aujourd’hui l’offre !

TSMC a récemment annoncé un investissement de 100 milliards de dollars sur trois ans pour accroître sa capacité de production. Car depuis un an, les usines de l’entreprise ont beau tourner à plein régime, la demande surpasse toujours l’offre. Idem pour Intel, qui annonce un investissement de 20 milliards de dollars pour la construction de 2 nouvelles usines aux Etats Unis.

Vers une alliance stratégique européenne sur le semiconducteur

Pour réduire cette dépendance stratégique et profiter de l’explosion attendue du marché, l’Europe doit donc adopter rapidement des mesures volontaristes combinant diversification des approvisionnements, aide à l’installation d’industriels étrangers sur son territoire, soutien au développement de la filière locale et contrôle des investissements étrangers.

Consciente des enjeux, l’Union européenne s’est engagée en décembre 2020, dans le cadre du plan de relance, à soutenir l’industrie européenne des semi-conducteurs. Objectif : produire à terme au moins 20% des circuits intégrés dans le monde.

La France, l’Allemagne et 11 autres pays européens (dont l’Espagne, l’Italie, la Belgique et les Pays-Bas) vont unir leurs forces dans les puces électroniques et les semi-conducteurs, et s’engager à investir en commun dans ces technologies « à travers toute la chaîne de valeur », en mobilisant les principaux acteurs du secteur en vue d’une « future alliance industrielle », selon une déclaration commune.

Les 13 signataires, qui invitent l’ensemble des pays de l’Union européenne à les rejoindre, entendent également travailler à l’établissement de standards communs pour des technologies électroniques sécurisées. L’objectif est « d’établir des capacités européennes avancées dans la conception et la production de puces ».

Il est prévu que 20% de ce plan soit consacré aux technologies numériques, soit jusqu’à 145 milliards d’euros sur les trois prochaines années. La coopération prévoit de « mettre en commun des investissements et coordonner les actions des acteurs publics et privés ». Il s’agit de « créer des synergies entre les initiatives de recherche nationale (…) et d’assurer une approche européenne cohérente à une échelle suffisante ».

L’idée est lancée, pour la première fois en juillet 2020, par le commissaire européen au Marché intérieur Thierry Breton, fervent défenseur de la souveraineté numérique de l’Union européenne. Elle vise à doter l’Europe d’une capacité de production sur son territoire des deux prochaines générations de puces les plus avancées en technologies de 3 et 2 nanomètres, contre 5 nanomètres pour la génération actuelle la plus avancée.

Quelle place pour l’écosystème Grenoble Alpes et inovallée dans cet enjeu stratégique majeur ?

Dans cette course technologique où les géants asiatiques et américains de partagent le marché, l’Europe dispose de 3 atouts majeurs dans sa manche :

  • la lithographie aux ultraviolets extrêmes incontournable à partir de la gravure de 7 nanomètre avec le néerlandais ASML,
  • les logiciels d’aide à la conception avec l’allemand Siemens EDA (grâce au rachat en mars 2017 de l’américain Mentor Graphics par Siemens),
  • et les composants pour l’automobile avec l’allemand Infineon Technologies, le néerlandais NXP et le franco-italien STMicroelectronics.

« Ce sont là des technologies d’étranglement clés, souligne Mathieu Duchâtel. L’Europe doit tout faire pour conforter ces forces. Elle pourra ainsi s’en servir pour conclure une alliance d’interdépendance avec les Etats-Unis. L’Europe doit dès maintenant développer sa résilience face au choc futur entre les Etats-Unis et la Chine. C’est le moment de le faire.  »

Le projet est donc de rassembler une vaste coalition industrielle comprenant des fabricants de puces, des équipementiers électroniques et des utilisateurs finaux comme Airbus, Alstom, Philips, Renault ou Volkswagen. Car les moyens à mobiliser sont considérables : 10 à 20 milliards de dollars. « L’Europe a tout à gagner à le faire, estime Mathieu Duchâtel. Cela créerait tout un écosystème de fournisseurs, sous-traitants et start-up, avec à la clé le développement d’emplois hautement qualifiés, et entraînerait un cercle vertueux de recherche, d’innovation et de développement pour toute l’industrie microélectronique européenne. Mais cela soulève la question de savoir qui pourrait prendre en charge ce projet et dans quel pays l’implanter. L’usine a besoin de s’insérer dans un écosystème existant comme Dresde en Allemagne ou Grenoble en France.  »

Et oui, Grenoble pourrait bien être au cœur de cet enjeu européen majeur. Rien d’étonnant d’ailleurs, puisqu’on y trouve les 3 acteurs cités plus hauts : ASML, Siemens et STMicroelectronics, dont deux sont … sur inovallée !

Inovallée : 35 entreprises et 1500 emplois pour la filière semiconducteur et micro-électronique !

Quant à inovallée, elle est également bien placée pour permettre à la France et l’Europe de réussir son changement de cap, puisque l’industrie électronique y représente quelques 35 entreprises et 1500 emplois, dont la présence de grands leaders industriels comme :

  • Asteelflash, un EMS 100% français spécialisé ans la sous-traitance électronique et électromécanique répondant aux besoins d’intégration de fonctions de ses grands donneurs d’ordres dans les secteurs de l’industrie, de l’énergie, de la défense et de l’aérospatial, du transport ou du médical.
  • JEM Europe, leader mondial dans l’industrie des cartes à pointes, construit, répare et vend des cartes à pointes pour des grands fabricants de semi-conducteurs sur le marché Européen et en Israël.
  • KLA Tencor France : KLA TENCOR est parmi les dix premiers fabricants d’équipements de semi-conducteurs, dans le monde. Vente et SAV d’équipements conçus et fabriqués par la maison mère aux USA. Equipements utilisés dans l’industrie des semi-conducteurs pour le contrôle des circuits intégrés à différentes étapes du processus de fabrication.
  • LAM Research : Commercialisation d’équipements pour semi-conducteurs
  • SPTS Technologies : Fabricant d’équipements pour l’industrie des semi-conducteurs
  • Teradyne : Fabrication, vente et maintenance d’équipements industriels destinés au test des semi-conducteurs.
  • ASML : leader mondial en fabrication de systèmes à technologie avancée pour les semi-conducteurs. Service maintenance d’équipements en photolithographie (étape technologique dans le domaine de la microélectronique). Équipement de production de circuits intégrés.
  • Mentor Graphics France, racheté par Siemens : l’un des leaders mondiaux de l’EDA (Electronic Design Automation). L’entreprise développe et commercialise des logiciels pour le marché de l’électronique (systèmes, cartes imprimés, circuits intégrés). Elle fait partie du groupe Siemens dans l’entité Siemens Digital Industries Software, le numéro 1 des logiciels techniques dans le monde, et offrant le catalogue le plus complet de logiciels permettant de créer des jumeaux numériques de systèmes électriques, thermiques et mécaniques.
  • Tokyo Electron Europe  : Commercialisation et Service après-vente de machines dans le secteur des semi-conducteurs.

Outre ces acteurs clés de l’industrie du semi-conducteur, on trouve également quelques leaders du fabless comme Kalray, Tiempo Secure, Antaios, Dolphin, NanoImpulse, IC’Alps ou Smartnvy, ou encore de l’instrumentation, comme Metrologic Group, Oros, ou Teemphotonics.

Alors misons que l’Europe ait un coup à jouer dans l’échiquier mondial, que la France soit une de ses pièces maîtresses et qui sait … Grenoble son futur terrain de jeu !

 

Sources de l’article :

https://www.usinenouvelle.com/article/et-si-l-europe-se-dotait-d-une-fonderie-avancee-de-puces.N1048489

https://www.lefigaro.fr/vox/economie/l-europe-peut-elle-devenir-un-champion-des-semi-conducteurs-20210405

https://www.capital.fr/entreprises-marches/leurope-unit-ses-forces-dans-les-semi-conducteurs-face-a-lasie-et-aux-etats-unis-1387939

https://www.franceinter.fr/emissions/geopolitique/geopolitique-29-avril-2021

https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/comment-retrouver-la-souverainete-europeenne-dans-les-semi-conducteurs-1293650

https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/semi-conducteurs-l-autre-bataille-de-la-souverainete-europeenne-880811.html

https://www.forbes.fr/business/la-france-championne-de-linnovation-dans-un-pays-sans-usines/

https://www.lepoint.fr/economie/le-fabless-passion-francaise-13-10-2011-1387565_28.php

 

 

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