Fin novembre, Philippe DERAIN, expert du Développement Commercial des PME, est venu donner aux startups du Tarmac douze conseils pratiques pour programmer leur réussite commerciale. Car, même si les startups naviguent dans un océan d’hypothèses tant que leur solution n’a pas rencontré son « market fit », la stratégie commerciale reste le nerf de la guerre ! Les futurs financeurs, banques comme investisseurs, leur demandent nécessairement comment elles vont réaliser leurs chiffres lorsqu’elles établissent leur prévisionnel. Construire une véritable stratégie commerciale est donc, selon Philippe DERAIN, un impératif car, il cite une phrase d’Henry Kissinger pour illustrer son propos : « Quand on ne sait pas où l’on va, tous les chemins mènent à nulle part » !
Philippe DERAIN invite donc les startups à dresser, dans un premier temps, un état des lieux de leur stratégie commerciale actuelle. Les questions à se poser ? « Comment vais-je organiser mon développement commercial ? Quels sont les principaux freins auxquels je suis confrontée ? Comment y faire face ? Mon fichier client est-il qualifié ? Dois-je prioriser la fidélisation ou la prospection ? Quels outils marketing ai-je à ma disposition ? Quel est mon plan d’actions ? Comment mesurer mon efficacité commerciale ? ».
Conseil n°1 : Adoptez une bonne habitude en 2022 !
La stratégie commerciale doit en effet être programmée dès le départ et définie à moyen et à long terme. C’est un processus routinier, qui se prépare, se déroule et nécessite une vraie démarche structurée. D’ailleurs, selon Philippe, les actions commerciales prioritaires sont malheureusement souvent négligées. On pense « plan de financement », « trésorerie », « production », « lancement produit », « marketing », « normes », etc. Mais très peu « plan commercial avec démarche Prospects ». Pourtant, Philippe insiste : « Une action commerciale improvisée ou opportuniste est une mauvaise idée. Il faut considérer l’action commerciale dans une logique industrielle, industrialiser son processus commercial. L’entrepreneur a souvent une culture technique ou métier, plus que commerciale. Pourtant, pour avoir les moyens de ses ambitions, il faut impérativement avoir une ligne budgétaire qui correspond à la partie commerciale, car il est difficile d’attirer de bons commerciaux ».
A ces premiers éléments viennent s’ajouter d’autres questions importantes pour organiser et développer la partie commerciale de l’entreprise : « Est-ce que je sais vendre ? Ai-je les bons outils pour cela ? Ai-je le temps de le faire ? » Il faut alors déterminer le nombre d’heures par jour, ou par semaine, que le chef d’entreprise peut affecter sur la partie vente. Une journée par semaine minimum doit être consacrée aux démarches commerciales. Il est primordial d’intégrer très en amont la partie commerciale dans son planning, car « lorsqu’on se rend compte qu’on n’a pas assez fait de commercial, il est déjà trop tard ! », avertit Philippe DERAIN.
Une autre question cruciale à se poser pour l’entrepreneur « est-ce que j’ai envie de le faire ? ». Si ce n’est pas le cas, il faut être lucide sur cette question, trouver des solutions pour le faire et se faire aider le cas échéant ! Le risque pour l’entrepreneur est de perdre du temps et des clients. Construire une base commerciale est en effet un travail de longue haleine.
Conseil n°2 : soigner les quatre étapes clés de sa stratégie commerciale
1/ Quelle stratégie commerciale ? Quels clients je vise ? Que vais-je facturer à qui ? Pour argumenter, convaincre, donner des preuves concrètes, il faut garder en tête ce que l’on facture et à qui !
2/ Quelles stratégie et actions marketing à mettre en place ? Etudes de marché, actions marketing : comment je vais contacter / toucher tous ces gens tout au long du processus ? Ce processus doit être défini dans un plan marketing déterminé.
3/ Quel Plan d’Actions Commerciales (PAC) ? Un plan d’actions commerciales est une feuille de route mise en place par la direction commerciale pour atteindre les objectifs fixés par l’entreprise. Il s’agit d’un document hautement stratégique et très opérationnel, censé faire le lien entre la stratégie d’entreprise (le cap fixé) et l’exécution opérationnelle sur le terrain par les commerciaux. Le plan d’actions commerciales est un enchaînement de campagnes qui décrivent vos « gestes métier », étape par étape !
En fonction de l’environnement externe (état du marché, concurrence, évolutions technologiques, etc.) et de l’environnement interne (l’entreprise, ses ressources humaines et financières, ses avantages concurrentiels, etc.), un bon plan d’action commercial vient décrire de manière très spécifique des moyens et des actions concrètes à mettre en œuvre, ainsi que des priorités pour permettre à la force de vente d’atteindre les objectifs commerciaux fixés.
4/ Quels indicateurs de performance ? Puisqu’on a un plan d’actions, il est nécessaire de choisir des indicateurs pour savoir si on est sur la bonne voie ou si on fait fausse route. Bien entendu, le choix de vos indicateurs de performance, ou KPI, doit être en adéquation avec votre activité et vos problématiques phares. Votre tableau de bord devient un outil conçu sur mesure pour votre stratégie : 10 indicateurs de performance stratégiques se dégagent et doivent être pris en compte dans vos analyses : Indicateurs de performance liés à la sectorisation, aux actions de vos commerciaux, au taux de conversion de fidélisation au chiffre d’affaires réalisé… A vous de choisir les vôtres !
Conseil n°3 : Rendez vos objectifs concrets
En tant qu’entrepreneur, vous devez vous donner des objectifs concrets, en utilisant la notion d’entonnoir comme dans tout processus commercial. Par exemple, pour signer 3 commandes, je dois faire 10 devis et contacter 200 clients. Si on part de la fin, par exemple des objectifs de chiffre d’affaires, cela permet de dérouler un rétroplanning d’actions : « Si je dois atteindre ce montant en X temps, sachant qu’un panier moyen est de X€, il me faut faire 4 devis pour 1 contrat, soit 40 devis pour 10 contrats. Pour avoir 4 devis, il me faut 8 rendez-vous. Pour avoir un ordre idée, une liste de 500 contacts donne souvent lieu à 2 commandes seulement.
Pour revenir à la « routine commerciale » évoqué précédemment, on appelle plusieurs personnes dans la journée pour avoir des prospects en quantité suffisante, et donc générer 1 ou 2 commandes. Cet exercice, qui peut paraitre très ingrat, est véritablement la colonne vertébrale de la stratégie commerciale. La prospection téléphonique ou des outils digitaux doivent être mis en place pour cela.
Conseil n°4 : Soyez ambitieux mais réaliste !
Si vous devez être ambitieux par rapport aux objectifs fixés, pour répondre aux enjeux des investisseurs notamment, vous devez également être réaliste. Réaliste dans le temps : « il se passe souvent 4 fois plus de temps qu’on imagine, soyez prudent sur ce point qu’on ne maîtrise pas ! », ajoute Philippe. Attention également à être réaliste dans vos investissements et dans vos objectifs.
Conseil n°5 : Identifiez vos cibles
Avez-vous l’impression de bien connaître vos cibles ? Quel serait le client idéal ? Avez-vous suffisamment segmenté vos marchés ? N’hésitez pas à utiliser la méthode des personae pour définir vos cibles. Le personae est un personnage fictif créé par le marketing pour analyser le comportement d’un client ou d’un prospect. Un persona représente les caractéristiques d’un groupe d’individus. Il s’utilise aussi bien en B to B qu’en B to C. seuls les critères changent pour s’adapter aux particularités de l’activité.
Ce centrage sur des profils quasi réels contribue à développer une culture client à part entière et facilite la communication entre les équipes. Cela permet de construire une stratégie marketing efficace reposant sur une segmentation pertinente – profitable à l’ensemble des niveaux du mix (stratégie de communication, produit, prix, distribution). Du point de vue de la prospection commerciale, établir des profils type facilite l’identification de prospects potentiels pour générer de nouveaux clients.
Deux approches sont possibles, voire combinables. Une analyse de données quantitatives internes/externes accompagnée d’un brainstorming interne et/ou bien une étude terrain en interviewant la cible pour recueillir des éléments descriptifs et motivationnels.
Conseil n°6 : Faites passer le CAP à votre argumentaire de vente
- Caractéristiques : les caractéristiques de votre produit, services, de votre entreprise
- Avantages : les avantages pour les clients par rapport aux concurrents (bien les formaliser
- Preuves : les preuves que vous apportez (par exemple, liste de références, durée d’expérience…)
Dans une phase de prototypage, les preuves peuvent être apportées par des comptes-rendus, ou des rapports techniques qui montrent que ça fonctionne. Il faut systématiquement se mettre à la place de l’acheteur pour imaginer ce qui le convaincra.
Quelle est la méthode de prospection la plus adaptée ?
- Réseautage
- E-mailing
- Internet
- Phoning reste utilisé
- Stands, Foires, salons professionnels
- Bouche à oreilles
- Réseaux sociaux
- Annuaires professionnels
- Fichiers Démarchage
- Publicité
Lesquels choisir ? A chaque cible correspond ses outils et sa stratégie de commercialisation. Un moyen qui peut s’avérer efficace est de combiner les méthodes et d’opter pour une stratégie multi-canale.
Conseil n°7 : Construisez vos campagnes
Environ 1 PME sur 5 a un vrai plan d’actions commerciales (PAC) structuré et suivi, ce qui est très peu. Un processus de gestion commerciale doit absolument être mis en œuvre. Attention, la prospection est un investissement, avec un enchaînement de rouages. Le plan d’actions a pour rôle de l’optimiser !
Vous pouvez construire vos campagnes sur Excel, ou sur tout autre logiciel de suivi de projet. Mais le principe fondamental est de le faire, de le suivre, de le structurer ! Vous devez concevoir le discours pour chaque cible et les relancer. Vous devez mettre chaque étape noir sur blanc et les faire. Les suivre de manière réaliste et définir qui fait quoi (des codes couleurs par exemple permettent d’affecter des tâches à certaines personnes). Le PAC est un véritable outil de pilotage, à remettre à jour régulièrement.
La partie relance prospection peut être réalisée par un cabinet extérieur, mais attention, si le cabinet est trop présent, ce n’est pas une bonne pratique ! Cette méthode d’affecter une couleur par intervenant permet de voir si cela reste équilibré ou pas. En règle générale, la startup doit veiller à ne pas vouloir faire trop tôt, ni trop de choses par l’extérieur.
Mettre en œuvre un processus de gestion de l’information commerciale consiste à organiser l’action :
- QUOI / POURQUOI ?
- CIBLE ?
- COMMENT ?
- QUI ?
- COMBIEN ?
- QUAND ?
- BUDGET
Le PAC doit impérativement être suivi et structuré car, malgré les contacts, devis et autres, 70% des affaires ne se concrétisent pas par manque de suivi (relances notamment). Le Plan d’Actions Commerciales doit permettre aux fonctions commerciales de se projeter, de les engager et les contrôler.
Conseil n°8 : Anticipez pour recueillir l’information commerciale
La gestion de l’information est capitale dans le processus commercial ! Tout l’enjeu réside dans l’enrichissement de sa base de données clients. Si vous ne voulez pas perdre l’information, il faut donc prévoir en amont les contenants pour la collecter et capitaliser dessus.
Un CRM peut être un bon outil mais… attention à ne pas mettre en place une usine à gaz et à bien dimensionner l’outil pour ne pas démotiver les forces commerciales et faire en sorte qu’il soit utilisé. L’outil choisi doit être adapté à la taille de la structure, à ses usages et ses goûts. Attention aussi de ne pas donner l’impression aux commerciaux d’être fliqués.
La fiche de renseignement est donc la CLE de cette information commerciale.
L’objectif principal d’une action de prospection est en effet de découvrir :
- Les besoins de notre prospect
- Ses motivations
- La date prévue de son achat (notions de timing pour savoir quand doit aboutir le deal)
- Une offre adaptée
- Au bon moment
Chaque campagne doit venir enrichir votre base de données commerciales et faire vivre ce fichier… à condition d’avoir prévu les « contenants » pour recueillir cette information. « Sensibilisez toutes vos équipes sur l’importance de la collecte des données concernant les prospects & clients », rappelle Philippe DERAIN.
Conseil n°9 : Découpez vos prospects en catégories
Les campagnes permettent de qualifier vos suspects et de les classer en différentes catégories, en fonction de leur potentiel. Attention au(x) piège(s) des prospects mineurs trop chronophages… Les plus chronophages commercialement parlant ne sont pas forcément les plus intéressants. Vous devez vous concentrer sur vos vrais objectifs, vos vraies cibles.
Conseil n°10 : Préparez-vous, formez, informez…
- Préparez les outils qui vous permettront de gérer votre processus commercial (CRM, tableaux de bord…)
- Préparez les documents, les argumentaires de vente, dédiés aux différents produits et cibles (présentations, réponses aux objections…). Réflexion amont sur comment je touche ces gens, qu’est-ce qui va les impacter, quelles preuves tangibles je peux leur apporter ?
- Formez vos équipes et concevez un programme d’intégration : donner à vos commerciaux les bons outils, les bons argumentaires, des formations sur les réponses aux objections.
- Harmonisez les actions des collaborateurs en lien avec le commercial, bien définir ce qu’ils doivent faire, ce qu’on attend d’eux. Harmonisez aussi les discours pour que client ait le même discours quel que soit le commercial reçu.
Dans une petite structure, il peut y avoir un chevauchement entre marketing opérationnel et commercial. A vous d’adapter à la taille de votre startup car il n’y a pas de règle absolue.
Conseil n°11 : Mesurez votre performance
Pas de suivi ni de progrès sans mesures ! Les objectifs doivent être…
- Simples et spécifiques
- Mesurables
- Accessibles (et Ambitieux)
- Réalistes
- Temporels
- Evaluables
- Révisables
Les Indices de Performances (IDP) les plus courants :
- CA réalisé (par période, client…)
- Commandes obtenues (CA encaissé pour éviter les clients insolvables par exemple)
- Marge (laquelle ? brute ou nette, coût de fabrication X2)
- Unités vendues (pièces, heures de prestations…)
- Nombres de contacts, de visites, de devis réalisés, …
- Nouveaux clients ou renouvellement, prendre clients à concurrents
- Quantitatifs internes : qualité apprentissage, qualité intégration (préparation à aller sur terrain par ex), etc.
Conseil n°12 : Commencez dès maintenant
Essayez de facturer un produit ou un service dès maintenant, même si votre produit final n’est pas terminé.
Les facteurs clés de succès :
- Une programmation à long terme
- Une organisation méthodique
- Un contrôle permanent
- La volonté et l’engagement du dirigeant (un développement commercial proactif se sent dans l’équipe, c’est le dirigeant qui donne l’impulsion)
- Passer à l’action !
Points clés de réussite :
Quelle que soit la taille d’une société, la fonction commerciale est vitale pour sa pérennité et sa croissance. Beaucoup de sociétés s’inquiètent de la baisse du CA et la gèrent en réduisant les coûts. Mais beaucoup moins pensent à renforcer leur force de vente, à investir en marketing et à introduire de nouveaux produits/services… Il ne faut en aucun cas empêcher les commerciaux d’aller sur le terrain ! Être coupé de l’information terrain est très frustrant et pas forcément une bonne pratique.
Les principales causes d’échecs…
- Marché mal ciblé : quand il n’y a pas de besoin il n’y a pas de besoin !
- Clientèle potentielle surévaluée
- Délais de décision clients sous-estimés (marchés publics ou grands comptes très longs par exemple)
- Gamme de produits/services insuffisante
- Politiques de communication & prospection négligées
- Insuffisance de présence sur le terrain : rencontrer les gens sur le terrain et sur le salon
Un bon commercial doit savoir faire des retours terrain qui alimentent la stratégie, si ce n’est pas le cas, vous devez le prendre comme un signal que ce n’est pas un bon commercial. Si le besoin n’est pas là, il faut repartir dans ce cas sur le ciblage, sur une prospection sur d’autres cibles de marché.
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Philippe Derain et le Réseau Prospactive en bref
- Philippe possède 25 années d’expérience en développement commercial des PME, en France et à l’international, dans le monde industriel principalement (secteur automobile)
- Indépendant, rattaché au Réseau Prospactive, une référence en matière de Développement Commercial, créé à Dijon en 1995, pour bénéficier de l’expertise des autres indépendants
- Environ 50 experts indépendants sur la France
- Plus de 2.000 entreprises accompagnées en 20 ans
- CA des clients : 150k à 10M
- Effectif de nos clients 1 à 100
- Taux de missions renouvelées 80%
- Un riche écosystème de partenaires, reconnus par les institutionnels
- Leur Métier : Organiser et Accélérer le développement commercial des entreprises