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De la création au premier bilan, comment optimiser sa stratégie financière pour bénéficier des aides ? Les 5 conseils de Thierry Cravoisier (RoCamRoll)

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Qui dit stratégie financière pour une entreprise innovante dit bien optimisation et maximisation des ressources. En effet, tout au long de sa vie, l’entreprise a une motivation principale : solidifier sa trésorerie, c’est-à-dire financer son besoin en fonds de roulement. Pourtant, d’autres mécanismes sont primordiaux à connaître pour réussir sa startup et, notamment, faire son premier bilan est un exercice hautement stratégique. Thierry Cravoisier, CEO de la startup RoCamRoll, est venu faire un retour d’expérience fin août dernier pour permettre aux startups fraîchement incubées au Tarmac d’éviter certaines erreurs. Des conseils dont il aurait aimé bénéficier lors de sa création il y a maintenant 5 ans !

Car Thierry l’affirme aujourd’hui : « Pour une entreprise innovante, il ne faut jamais perdre de vue que c’est une stratégie globale à mettre en œuvre : il s’agit d’optimiser en permanence son montage financier entre capital social, quasi-fonds propres, comptes associés, etc. » Pour lui, faire son premier bilan demande une véritable éducation pour pouvoir accéder aux aides BPI !

Subventions (Bpifrance, H2020, Régions, etc.), Prêts et avances remboursables (Bpifrance, Régions…), ou encore exonérations fiscales (CIR, CII, JEI), le recours aux aides financières nécessite la mise en place d’une réelle stratégie économique afin d’optimiser la comptabilité et les capacités financières de l’entreprise. Il s’agit d’un cercle vertueux : plus l’entreprise fait preuve d’une bonne gestion comptable, plus elle est bonne candidate aux aides. Plus elle bénéficie d’aides, et plus sa stabilité financière est assurée.

Conseil n°1 | Bien comprendre la limite des fonds propres avant de solliciter les aides BPI France

Lorsque vous cherchez à obtenir une aide pour votre startup, et que vous vous adressez à la BPI, une question revient très souvent sur le tapis : quels sont vos fonds propres ? Cette notion, souvent mal comprise, est fondamentale pour obtenir vos subventions, vos avances, ou encore vos prêts ! En effet, les organismes publics peuvent vous financer dans la limite de vos fonds propres, qui représentent un “plafond” pour tous vos financements.

Les fonds propres apparaissent sur votre bilan. Il s’agit de la ligne “capitaux propres”, qui, d’année en année, augmente ou diminue en fonction de votre exercice fiscal. Mais la BPI procède à un calcul de vos fonds propres en y soustrayant vos dettes (prêts bancaires, etc.), et en ajoutant vos comptes courant d’associés. Ces derniers sont considérés comme des quasi-fonds propres. Si vous n’avez pas encore de bilan car vous êtes dans votre premier exercice fiscal, les fonds propres comptables sont généralement constitués par votre capital social versé en numéraire.

Conseil n°2 | Optimiser ses écritures comptables pour ne pas passer sous les 50% des fonds propres

La première règle selon Thierry est de veiller à ne jamais passer sous 50% des fonds propres, c’est-à-dire perdre la moitié de son capital social. Cela parait évident dit ainsi mais, dans la pratique, de nombreuses sociétés perdent la moitié de leur capital social, particulièrement au début de leur activité et bien souvent par méconnaissance des écritures comptables.

La perte de la moitié du capital social de la société signifie que le montant des capitaux propres d’une société est devenu inférieur à la moitié de son capital social. Il ne s’agit donc pas forcément de la perte de l’exercice qui dépasse la moitié du capital social. Il peut s’agir des pertes cumulées. Les capitaux propres sont les ressources de l’entreprise et correspondent au capital social plus les réserves plus le résultat de l’exercice.

Par exemple, une SARL au capital social de 1 000 € réalise une perte de 750 € au cours de son premier exercice social, les capitaux propres de la société seront de 250 €. Les capitaux propres de la société sont donc inférieurs à la moitié du capital social.

Lorsque que vous bénéficiez d’un prêt bancaire, votre trésorerie peut être confortable. Mais attention, vos fonds propres ne sont pas votre trésorerie d’un point de vue comptable. Le montant de votre dette bancaire sera donc soustrait de vos fonds propres disponibles. Car l’argent que vous avez emprunté devra être restitué avec des intérêts. Il ne peut donc pas être considéré comme un capital acquis pour votre entreprise.

Or, cette limite pénalise très souvent les entreprises qui ont peu de moyens. Thierry Cravoisier témoigne : « J’ai passé 6 ans classé 6 à la banque de France (publié sur le Kbis au greffe). Cela signifie notamment qu’on ne peut plus répondre à des marchés publics. Car la capacité de mon entreprise à honorer ses engagements financiers était jugée très faible », explique Thierry Cravoisier. « Pourtant, avec le recul, ce n’était que de l’écriture comptable ! ».

En effet, il suffit parfois d’avoir un exercice déficitaire pour que les fonds propres soient quasiment nuls, voire négatifs. Dans ce cas, vous aurez très peu de chances de recevoir un financement public. La logique est que, quel que soit votre projet à financer, la BPI prendra en charge une part seulement de votre programme de dépenses. Il faut donc démontrer que votre entreprise est en mesure d’assurer la part des dépenses qui lui revient. Cette règle des fonds propres constitue donc une garantie de votre solidité financière.

Retrouvez dans cet article les conseils de Laurent Cohn de BBM qui vous indiquent quelques mécanismes permettant de préserver ou d’améliorer les fonds propres.

Conseil n°3 | Remplir vos comptes dès que vous le pouvez !

Si un exercice fiscal est un peu long, l’entreprise innovante ne doit surtout pas hésiter à aller chercher des aides, des effets levier avec BPI (prêt amorçage notamment), des prêts honneur… À chaque entreprise de définir sa stratégie du financement de l’innovation pour obtenir la bonne aide au bon moment. Mais une chose est sûre, si vous n’avez pas de fonds propres suffisants pour aller voir BPI, vous devez absolument procéder à un renforcement de ces derniers. Pour cela, vous pouvez procéder à un apport en compte courant d’associé. Mais attention, intégrez dans votre roadmap que la BPI va vous demander de le bloquer le temps de votre projet (entre 6 et 18 mois selon votre financement en général).

Si vous n’avez pas la possibilité de mettre un compte courant d’associé complémentaire, vous pouvez solliciter des organismes comme le Réseau Entreprendre ou France Initiative, qui proposent aux dirigeants des prêts d’honneur. Ces prêts vous sont versés à titre « personne » et peuvent être versés en compte courant d’associés et augmenter ainsi vos fonds propres disponibles.

Dans certains cas, cela peut être le moment d’ouvrir votre capital et de procéder à une levée de fonds. Mais il existe d’autres dispositifs moins dilutifs. Par exemple, l’investissement en royalties avec des plateformes comme WeDoGood. Thierry Cravoisier a, quant à lui, opté pour une levée de fonds en love money, ces fonds apportés par l’entourage proche d’un entrepreneur pour lui permettre de créer ou de développer son entreprise.

Pour réussir et sécuriser cette opération, il est d’ailleurs possible de passer par une plateforme en equity. Attention toutefois, ces plateformes sont des outils uniquement, car le porteur de projet doit amener plus de 50% des investisseurs ! Dans tous les cas, l’objectif reste de répartir le risque entre fonds propres, banques et investisseurs.

Conseil n°4 | Clore son premier bilan au bout de 6 mois vs 16 mois

Les aides fiscales à l’innovation représentent une vraie solution pour renforcer la trésorerie des entreprises. Malheureusement, à l’instar de RoCamRoll, des milliers d’entreprises innovantes sont pénalisées par les délais de remboursement du CIR. Ces situations mettent à mal leur développement global, avec à la clé des projets d’embauches et d’investissements qui tournent court. Et le problème s’aggrave pour les entreprises déjà en situation de trésorerie tendue, qui se retrouvent dans l’incapacité de faire face à leurs échéances du fait du non-respect des conditions et délais de remboursement du CIR par le Trésor Public.

Thierry Cravoisier conseille donc de ne pas hésiter à « harceler » son expert-comptable dès le mois de décembre pour disposer fin janvier de son bilan comptable et toucher ainsi le CIR en février / mars. Pour lui, aucun doute, mieux vaut clore son premier bilan au bout de 6 mois et non au bout de 16 ou 18 mois pour le CIR.

Conseil n°5 : Immobiliser sa R&D dès le premier bilan et passer tous les projets non aboutis au rebut

Si on schématise, la trésorerie ce sont les recettes et les dépenses au quotidien. Tandis que le compte de résultat regroupe l’immobilisation et l’amortissement, qui viennent grever le capital social. Si l’entreprise n’a pas la trésorerie suffisante pour tenir sur 12 mois, elle peut se heurter notamment à un refus d’un commissaire aux comptes (CAC).

Le dernier conseil de Thierry Cravoisier, et non le moindre, consiste donc à immobiliser au maximum ! Pour lui, vous ne devez amortir la R&D que lorsque vous la mettez réellement en service… En effet, une immobilisation amortissable est la constatation d’une perte de valeur d’une acquisition de l’entreprise. Cela signifie donc une perte de valeur d’un bien qui pourra être déduit du résultat comptable de l’entreprise. L’amortissement comptable signifie donc d’étaler le coût d’une immobilisation sur plusieurs années.

Or, si l’on considère que l’immobilisation n’est amortissable que lorsque le produit est mis en service, elle reste en haut-de-bilan, sans charges associés. On peut ainsi immobiliser de nombreux éléments, y compris des développements. Par exemple, lorsqu’une startup commence à faire du stock, elle peut immobiliser en espace de stockage et amortir sur 3, 5 ou 10 ans. Il est également possible d’immobiliser des produits de démo.

Selon Thierry, mettre en production est un choix du dirigeant et non de l’expert-comptable. D’ailleurs, si un projet ne devient pas un produit ou service, le dirigeant peut choisir de le mettre au rebut, le passer en scrap, afin de pouvoir le passer en charges.

Achat de matériel, prestations ou masse salariale : il est également possible de passer ces dépenses en produit pour compenser une partie du chiffre d’affaires. Mais attention, réfléchissez bien à votre stratégie, car on ne peut plus changer de mode de calcul en cours de route. Thierry conclura sur ces mots : « Pour moi, une startup devrait à 0 pendant plusieurs années, jusqu’à l’accès au marché » ! À méditer…

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